Dimanche 7 septembre 2008
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Par Philippe Vallin
Crista Galli - Matrice d'eau (Prikosnovénie 2008)

Crista Galli est le projet musical de Sarah et Jean-Paul Trutet, deux
poly-instrumentistes et vocalistes français dont la démarche s’intéresse tout particulièrement aux vertus thérapeutiques et contemplatives de la musique. Avec
Matrice d’eau, le duo
signe son premier album sur l’éclectique label Prikosnovénie, en inaugurant ainsi et avec un certain brio une toute nouvelle section de son catalogue dédiée à la méditation zen et à la
relaxation. Mais assimiler cette première œuvre à une quelconque soupe estampillée new-age serait une regrettable erreur. Car en effet, au delà des apparences et d’une relative approche
mystico-spirituelle qui pourra en rebuter certains, Crista Galli nous invite à une authentique expérience sensorielle et un voyage musical envoutant de bout en bout.
Inspirée par l’énergie du Cairn de l’île bretonne de Gavrinis, réputé pour être l’un des plus beaux sites mégalithiques du monde, Matrice d’eau immerge l’auditeur dans une atmosphère
irréelle, mystérieuse, à la fois sereine et intense. A travers cette œuvre entièrement acoustique qui laisse une part très importante à l’improvisation, le violoncelle, le piano, ainsi que
multiples instruments du monde dialoguent avec les voix, et principalement le chant harmonique (ou diphonique), que l’on retrouve en quasi filigrane tout au long de l’album. Aussi, les timbres
et les textures sonores se dévoilent petit à petit, pour s’entremêler crescendo dans un véritable tourbillon d’émotions incarné par cette formidable suite finale en quatre parties intitulée
Gavrinis.
Mais revenons-en au début. Après un démarrage en finesse qui nous permet de découvrir la jolie voix cristalline de Sarah Trutet sur fond de gouttes de pluie, Shin révèle les étranges
résonnances et subtilités du chant diphonique, exécuté ici en solitaire par son très doué et talentueux complice masculin. Les amateurs éclairés de cette pratique ancestrale et singulière ne
manqueront pas de faire le rapprochement avec les passionnants travaux de l'américain David Hykes, l’un des grands maîtres occidental du genre. L’artiste est d’ailleurs crédité dans le
disque comme influence avouée de Crista Galli. Changement de tonalité radical avec Racine, qui constitue certainement la pièce la plus riche de l’album avec son déploiement de
sonorités classiques et traditionnelles d’horizons divers. Volutes de cordes, bourdon de tampura, notes de cithare indienne et souffle du doudouk arménien fondent leurs mélopées avec différents
styles de chant. Parmi ces derniers, resurgit de manière étonnante le spectre du célèbre et regretté vocaliste pakistanais Nusrat Fateh Ali Khan, icône mondiale du fameux qawwalî, genre musical
du mouvement spirituel soufi.
Enfin, avant d’entamer le plat de résistance évoqué plus haut, le mélodique Oriental garden vient conclure cette première moitié d’album dans une ambiance lumineuse et enjouée, avec
ses jolis motifs asiatiques exécutés au piano. Vous l’aurez compris, Matrice d’eau est une incontestable réussite dans son ensemble, qui ravira à coup sûr les amateurs de David Hykes
et ses multiples explorations, et, pourquoi pas, de l’incontournable et génial multi-instrumentiste allemand Stephan Micus, chez qui on retrouve une sensibilité similaire. Un sans faute donc
pour ce premier essai discographique de Crista Galli, et une œuvre atmosphérique de toute beauté à découvrir sans tarder !
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