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Ce blog est consacré à mes activités d'animateur socioculturel à la ville de Saint-Denis (93), mais aussi de chroniqueur et de musicien amateur. Au fil de ces pages, vous pourrez suivre l'actualité de divers projets professionnels et autres initiatives que je pilote ou auxquels je suis associé : rencontres et événements culturels, concerts, scènes ouvertes, jumelages artistiques, etc. Quelques chroniques musicales seront également publiées selon les coups de coeur et l'inspiration. En bref, ce site est une petite fenêtre ouverte sur mon réseau de proximité, un espace d'information et de partage d'expériences. A bientôt ! PV.

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Dimanche 3 septembre 2006 7 03 /09 /Sep /2006 21:35
- Par Philippe Vallin
David Sylvian - Dead bees on a cake (Virgin 1999)

Cet album de David Sylvian est porteur d'une pop atmosphérique inclassable et hors-mode, à l'instar des oeuvres en solitaire du Mark Hollis de Talk-Talk. Si "Dead bees on a cake" est un véritable "bric à brac" musical faisant presque figure de catalogue (tous les aspects de l'univers Sylvian y sont représentés), rien à jeter cependant ici. L'album s'ouvre sur les 9 minutes du répétitif et langoureux "I surrender", soutenu par des arrangements de cordes classiques signés Ryuichi Sakamoto, l'auteur des B.O de "Furyo" et "The last emperor". La voix chaude au timbre unique du chanteur vous prend aux tripes d'entrée de jeu, soutenue par la magnifique trompette de Kenny Weeler, qui se partage les lignes mélodiques avec la voix.

Autre perle, le fameux "midnight sun", un pur blues mélancolique à souhait qui contient entre-autre des extraits samplés du "I'm wanderin" de John Lee Hooker, une bien agréable surprise ! Autre morceau, autre climax, que dire des 8 minutes de ce "krishna blue" aux résonances indiennes totalement oniriques, sur fond de tablas et percussions signées Talvin Singh, artiste de nationalité anglaise proche du registre "world" de Bill Laswell.

"Ail of my mothers names" explore quant à lui d'autres horizons, avec ses guitares jazzy torturées sur fond de musique planante, proche des expérimentations d'un autre trifouilleur de son, le guitariste avant-gardiste David Torn. Quelques nappes de synthé venues d'ailleurs, quelques lignes de guitare perdues à l'horizon, le son mystique du doudouk (heaubois arménien) et le disque s'achève dans un moment d'ultime pureté dont seuls quelques rares magicien ont le secret. Cette conclusion m'évoque les meilleurs moments du génial "Gone to Earth", album emblématique de David Sylvian à emmener sur une île déserte.

Voilà quelques morceaux choisis de ce merveilleux disque de David Sylvian dont l'intégrité artistique n'a jamais eue à être remise en cause à ce jour. En effet, depuis le début de sa longue carrière solo, on a vu le musicien céder à la facilité ou se compromettre dans une quelconque déviance commerciale. Un artiste rare au service d'une musique rare, et encore un album totalement indispensable. Philippe Vallin





David Sylvian
"Everything and nothing Tour 2001"
Théâtre de la Mutualité – Paris – le 10 octobre 2001


Artiste rare, concerts rares. Comme beaucoup, je n’avais pas eu l’opportunité de revoir David Sylvian sur scène depuis son fameux concert à la Cigale avec Robert Fripp, en 1993. Quel souvenir ! Cette soirée du 10 octobre 2001, ce sera un autre moment inoubliable qui se gravera dans ma mémoire de mélomane. Ici, point de redite, point de nostalgie béate à 200 balles de l’heure, mais la prestation d’un artiste vivant, sincère, original, au talent indémodable, qui le temps d’une soirée se sera payé luxe de  revisiter les meilleurs titres de son répertoire. En effet, David Sylvian (l'une des plus belles voix de la pop, n’ayons pas peur des mots ?), proposera des versions différentes et souvent magnifiées de ses plus belles perles, ainsi qu'une véritable pléiades d'inédits. La très belle salle de la Mutualité se remplie doucement alors que la première partie a déjà commencé. Il s’agit de Ready made, un duo de DJ’s français (platine vinyle et ordi portable) proposant un audacieux mélange de scratch issu tout droit de la culture Hip-hop et d’ambient music, savamment agrémenté de légers beat’s Technoïdes. La musique, assez froide dans l’ensemble, mais d’une certaine richesse sur le plan sonore, n’est pas sans évoquer celle d’Underworld, figure de proue de la frange techno branchée (je suis pour ma part assez fan de leur album "beaucoup fish" paru en 1999). Pendant que les deux musiciens rangent leur (peu encombrant) matos, l’ambiance étrange et feutrée de "The Beekeeper’s apprentice" (longue pièce instrumentale planante signée David Sylvian) envahi la salle. Dans quelques instants, ce sera parti pour plus de deux heures d’expériences sensorielles inédites, ou presque !

Les lumières, déjà bien basses et feutrées s’éteignent, et l'artiste fait son entrée, copieusement ovationné par son public, accompagné de 4 musiciens qu’il me tarde de découvrir. Sur cette tournée, il s’agira de son frangin et vieux complice Steve Jansen (batterie et percussions électroniques), Matt Cooper (claviers), Tim Young (guitares) et Keith Lowe (basse). Sylvian est comme à son habitude : brushing parfait, impeccablement habillé, très classe (noir et soie). Enfin, je veux dire surtout calme, serein et posé. Le set démarre avec une très jolie et entraînante chanson pop,"The Scent of Magnolia", qui ouvre de la même façon le double CD "Everything & nothing" paru l’année dernière. La salle s’envole, emportée par la musique, et contemplative devant un light-show magnifique. Celui-ci collera parfaitement à l’atmosphère de chaques titres qui s’ensuivront : tantôt rouge furieux, tantôt bleu doucereux. Le second morceau poursuit dans une veine aérienne puisqu’il s’agit de l’envoûtante ballade éthérée "Black water", qui n’aurait pas dépareillé sur le "Spirit of Eden" de Talk-Talk. Sur ce titre, Sylvian utilise une guitare acoustique qu’il reprendra régulièrement tout au long du set, alternant avec une électrique qu’il exploite avec une rare finesse et un feeling bien à lui. Puis s’enchaînent "God man", "I surrender" et son tempo langoureux presque funky. Matt Cooper fera ici une première démonstration de ses talents de pianiste jazzy  et virtuose. Celui-ci contraste totalement avec l’attitude stoïque de Sylvian, sautillant tel un Skippy en transe, faisant l’amour avec ses claviers, et ce avec une rare fougue ! Mais s'il délivre des solos enfiévrés au beau milieu d’une musique d’obédience calme et atmosphérique, il n’en dénature pas moins le contenu, bien au contraire.

Le ton se durci un poil avec "Jean the Birdman", morceau échappé de la période Sylvian/Fripp qui aura engendré deux superbes albums dont un live inoubliable ("The First day" et "Damage"). On reconnaît tout de suite la patte du célèbre guitariste (et ses riffs tranchants) qui trouve en Tim Young un excellent interprète. Le rêve et la contemplation reprennent de plus belle avec "Midnight sun", un blues onirique extrait de "Dead bees on a cake", le dernier album de Sylvian. Puis s’enchaînent les mélodies imparables et les arrangements délicats de "The boy with the gun", "Orpheus" et "Waterfront", tout trois extraits de son œuvre la plus acoustique et intimiste, le sublimissime "Secret of the beehive" (1987). David Sylvian quittera (enfin !) son siège et sa guitare pour entamer une incroyable version de "Heart beat" (œuvre co-écrite avec le musicien japonais Ryuichi Sakamoto), introduite par un savant cocktail samplé de voix radiophoniques et chant d’enfants pygmées. J’en frissonne encore ! "Linoleum", "Rooms of sixteen shimmers", les inédits se succèdent, mais on nage bien en plein univers Sylvian, enivrant d’émotions et de beauté. Puis "Ghost" nous replonge dans un lointain passé puisque celui ci est un glorieux (mais rare) échappé de l’ère Japan, groupe New-wave dont Sylvian fut le leader, et qui aura laissé de bien pires souvenirs. La chanson est complètement réarrangée pour l’occasion, et elle retrouve ainsi une seconde jeunesse.

"Pollen Path", "Cover me with flowers", ou quand les trésors oubliés de sessions d’enregistrement retrouvent leur droit à l’existence, certes éphémère , mais mérité sur scène. Puis c’est l’enchaînement de "Zero landmine" et de "Forbidden colours", titre que tout le monde a entendu au moins une fois dans sa vie. Il s’agit en effet du thème principal du film "Furyo", avec David Bowie et Ryuichi Sakamoto, compositeur de cette musique célèbrissime aux consonances asiatiques, ici reprise au piano. On ne quitte pas l’asie puisque le set se clôturera sur l’étonnant "Krishna blue", sa flûte bansuri et ses tablas électroniques, ici interprété dans une version puissante et folle furieuse que n’aurait pas renié un King Crimson. David Sylvian quitte la scène sous le tonnerre d’applaudissements d’une audience complètement vouée à sa cause, et qui aura ce soir manifesté un profond respect doublé d’un incroyable enthousiasme. La générosité de l’artiste aura porté ses fruits une nouvelle fois. Il y aura bien sûr 2 rappels, d’une part avec "Bhajan" (sur lequel Sylvian chante de sa voix de velours en hindi) et puis, pour finir, avec le classique "Red guitar", véritable hit sylvianesque que tout le monde attendait au tournant. Après avoir salué une dernière fois son public, toujours avec la même sobriété, l’artiste s’efface une dernière fois, laissant place aux nappes et textures de "Darkest dreaming", magnifique épilogue sonore d’un moment live unique et précieux. Philippe Vallin

(Chroniques parues dans le magazine Koid'9, Rock & Progressif)



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