
Un casque de cheveux courts d’un blanc pur sur un sourire
permanent. Nicole promène son regard chaleureux partout où les mots sont dits, lus, aimés. Slameuse, poète, peu importe, l’essentiel est dans le plaisir. Et le partage. Née Prudon juste après la
guerre, Nicole a grandi dans une famille aimante et tolérante rue des Moulins-Gémeaux. «
Là où est maintenant le CCN. C’était une impasse et on allait chercher l’eau à la fontaine », se
souvient-elle en insistant sur la convivialité, l’entraide qui régnaient entre les voisins. Elle va à l’école Jules-Guesde, puis au lycée Paul-Éluard.
De son père, journaliste à feu Saint-Denis Républicain, de sa mère, animatrice en maternelle, de cette maison, «
où on couchait sur des livres » et tellement ouverte au monde qu’il n’y
avait pas de clé, elle se forge une adolescence rebelle qui la pousse vers une double rencontre : son prof de philo, le poète Jean Marcenac, «
qui s’intéressait aux élèves qui ne rentraient
pas dans le moule, qui m’a apporté l’ouverture d’esprit », et Mai-68. «
C’était extraordinaire ! s’enflamme-t-elle encore aujourd’hui. Nous allions sur les barricades, puis dans les
cafés de Saint-Denis pour discuter. »
Après le bac, elle devient institutrice et enseigne d’abord à Saint-Denis, puis à L’Île-Saint-Denis, où elle a fait toute sa carrière. «
C’était une vraie vocation. J’ai toujours voulu
travailler avec les enfants. » Et puis il y a l’écriture. La grande affaire de sa vie. «
J’ai toujours écrit : mes impressions, mes révoltes, des poèmes… » C’est donc tout
naturellement qu’une fois à la retraite, après des années passionnantes dans l’enseignement, elle lit dans le JSD l’annonce de l’ouverture d’un atelier d’écriture avec Grand Corps Malade. «
Ce fut un véritable envol. Nous étions mélangés, personnes âgées, moins de 20 ans… On échangeait nos écrits, c’était très riche. »
Là, elle apprend à dire ses textes puis, de fil en aiguille, de rencontres en échanges, participe activement aux Slam’aleikoum du Café culturel («
quel dommage qu’il ait fermé ! »
s’écrie-t-elle), aux Fabrique du macadam, aux Slamélodie, bref à tout ce qui mêle les mots aux gens. Insatiable, elle est du projet d’Altamira, Tous pareils, et anime des ateliers de slam à
l’école Jules-Guesde, où elle fut élève, avec des… CP ! Elle évoque encore ses auteurs préférés, Prévert, Aragon, les surréalistes, «
ceux qui luttent », son amour de la randonnée, son
mari, Angel, et sa famille, «
qui me portent », son bonheur de vivre, son espoir, toujours, son goût des autres : «
Je n’existe que par eux ».
Tous les matins, à 5h, elle se lève pour écrire, jusqu’à 8h. «
Le plaisir d’écrire dans le silence… » Elle sort une feuille et offre quelques vers, frais du matin même, «
pour vos
lecteurs » précise-t-elle : «
Je vous slame pour 2010 une myriade de mots métis… Des mots d’orage pour dénoncer tous les carnages, des mots au goût de larmes chaque fois que se lèvent
les armes, des mots où le désir se mêle au désobéir. »
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